Léa
Le 19 juillet, par beau temps, nous partîmes à moins de 500 en mer d’Iroise. Mais, par un prompt renfort, nous nous vîmes plus de 100 000 pour accueillir l’Hermione, fille de Mélénas et d’Hélène, petite fille d’Océan.
Son ancêtre éponyme armé de 34 bouches à feu fut mis en chantier à Rochefort en 1778 et lance en 1779 sous le commandement de Louis-René-Madeleine de Latouche-Tréville (futur vice-amiral et commandant en chef des forces navales de la Manche sous Napoléon). Le 10 mars 1780, après de brillantes campagnes contre les corsaires anglais, L’Hermione prend à son bord Gilbert du Motier, marquis de La Fayette qui, le 28 avril, débarquera à Boston pour annoncer l’envoi de renforts français au général Washington.
<< Le 7 juin, l’Hermione croise à proximité de la pointe Est de Long Island. La Touche aperçoit quatre voiles. L’une d’elles est celle de la frégate anglaise l’Iris armée de 32 canons. Lors du combat, le gréement de l’Hermione est durement touché. Mais le feu des Français paraît supérieur et les Anglais rompent le combat. L’Hermione a tiré 260 coups de canon en une heure et demie. Il y a 10 morts et 37 blessés côté français. La Touche est blessé au bras. Le 16 mars 1781, la frégate participe à une bataille dans la baie de Chesapeake. Le 4 mai, le Congrès américain est reçu à bord de l’Hermione. Le 21 juillet, l’Hermione tire 509 coups de canon lors de la bataille de Louisbourg (Canada). Le 25 février 1782, retour de l’Hermione à Rochefort. >>
Date fatidique, le 20 septembre 1793, après de nombreux faits de gloire sur la côte française et dans le golfe du Bengale, manœuvrée par un équipage manquant d’expérience, l’Hermione sombrera sur le plateau du Four, au large du Croisic.
« Aujourd’hui vingt septembre mille sept cent quatre vingt treize l’an 2ème de la République française une et indivisible, la frégate l’Hermione commandée par le citoyen Martin Capitaine de Vau est appareillé de Mindin dans la rivière de Nantes pour se rendre à Brest avec un convoy d’après l’ordre qu’il en avoit reçu du Ministre. Le 7 duduit mois le vent étant au NE petit frais le pilotte de la rivière quitta la frégate lorsqu’il fût en dehors de la roche le Charpentier. Il la remis entre les mains du citoyen Guillaume Guillemin pilotte cotié de la frégate et provenant du batiment le Phénix qui avait relevé l’Hermione à la station de Mindin. Le vent étoit du NE variable au NNE, nous étions au plus près tribord amures sous le petit hunier et le perroquet de fougue pour entretenir un convoy de 12 batiments que je devois mettre devant Brest. A 6 heures du soir on fit un relèvement. Le pilotte cotié y assista et ce fut lui même qui donna le nom des pointes qu’on ne connoissoit pas. A 6 h.1/4 un grand batiment du convoy qui se trouvoit derrière la frégate vira de bord. Je demandois au pilotte pourquoi ce batiment viroit et s’il y avoit du danger à craindre sous le vent. il me repondit que non. Dix batiments du convoi étoient de l’avant de la frégate. Lorsqu’on cria brisants sous le vent le pilotte assuroit que ce n’étoit pas des brisants mais la force du courant qui faisoit cet effet. A 8 heures du matin la mer se trouvant au 2/3 basse la frégate a donné de la bande dans un instant avec une vitesse incroyable et dans ce mouvement rapide et s’est crevé totalement le coté de tribord. J’ai continué à faire travailler à sauver tous les effets de conséquence qui se trouvoient possible et de les faires transporter à bord du chasse marée ou nous avons été prévenus que si les vents passoient à l’ouest avec force il serait possible dans la position ou se trouvoit la frégate qu’il périroit beaucoup de monde. A la basse mer la frégate nous a paru totallement crevé. L’équipage s’est décidé avoir de l’abandonner et a passé sur les chasse-marées qu’on nous avoient envoyé du Croisic. J’ai abandonné le batiment à 10 heures du matin le dernier avec le maître d’équipage qui a donné trois coups de sifflet pour s’assurer qu’il ne restoit plus personne à bord. Je n’ai que le meilleur témoignage à rendre de l’Etat Major et des principaux maîtres et de tout l’équipage qui se sont tous portés avec le plus grand zèle la plus grande activité à exécuter les ordres que j’ai donné jusqu’au moment ou nous avons abandonné la frégate. On ne peut attribuer qu’a l’ignorance du pilotte costié la perte de la fregate qui paroit infaillible. Malgré tout ce que j’ai pû lui dire il m’a donné toutes les raisons qu’il setoit trompé et qu’il ne se croyoit pas aussi près du Four. Je l’ai amené à terre avec moi et l’ai remis entre les mains du juge de paix avec une dénonciation par écrit par laquelle je demande que ce pilotte soit intérogé publiquement devant tout mon équipage et le public du Croisic, afin qu’il soit constaté juridiquement que c’est par sa faute seulement que la frégate a été mise à la côte. En foi de quoi, nous avons clos et arrêté le procès verbal signé du nom de l’Etat-major et de ceux de l’équipage qui savoient écrire »…
Il aura fallu attendre plus de deux cents ans et le 4 juillet 1997 pour qu’une poignée de merveilleux doux fêlés amoureux de la mer et d’histoire, sur le lieu même de sa création originelle, fasse revivre ce bateau de légende. S’en suivront dix-sept longues années de labeur et d’incertitudes pour mener à terme cette entreprise de titan et permettre à cette petite fille d’Océan de goûter aux plaisirs de l’eau salée.
En présence de cette majestueuse frégate, marquée du sceau d’une nation aspirant à son indépendance, je ne m’attendais pas à avoir autant d’émotion. Le temps d’une larme et de quelques images, à la beauté et à la puissance de l’évènement s’est rajouté le passé historique de son ancêtre. Je n’étais plus au XXIe siècle, un, perdu dans une flottille hétéroclite, mais en 1781, face aux Anglais, au cœur de la bataille du cap Henry.
<< Lapérouse, ordonne de les prendre en chasse et L’Astrée et L’Hermione, toutes voiles au vent, foncent sur les bâtiments ennemis qui, ayant détaché leurs six bâtiments de guerre du convoi, attendaient en ligne. Il est 19h ce soir-là, lorsque les frégates françaises tirent les premiers coups de canon. Lapérouse et La Touche manœuvrèrent avec habileté et parviennent à désorganiser l’escadrille ennemie, qui se composait du HMS Allegeance, 24 canons, du HMS Charleslown, 20, HMS Jack, 14, du HMS Vulture, 20, et du HMS Thompson, 18. L’Hermione, après avoir envoyé plusieurs bordées au Vulture et au Jack, alla combattre le Charleslown, qui déjà avait affaire à l’Astrée et qui est obligé d’amener son pavillon. La Touche retourne aussitôt après sur le Jack, l’écrase de son feu, et le force à se rendre. Tous les ennemis vaincus, seule la nuit profonde leur permit de se dérober aux vainqueurs, non sans dommages. Seul le HMS Jack put être conduit à Boston >>
Ces quelques instants aux côtés de cette fille de Mélénas et d’Hélène resteront pour moi un moment inoubliable où le présent, drapé de bleu, de blanc et de rouge, rend hommage au passé.
Il y avait un vent bien établi et devait être génial de sillonner la rade de Saint Malo avec tous ces vieux gréements. J’ai suivi la construction de l’Hermione à la corderie de Rochefort. Je l’ai vu plusieurs fois dans le port de La Rochelle mais jamais sous voiles. Elle est superbe! Merci pour ces photos.
A très bientôt,P@ule
Bonjour Daniel,
j’aime beaucoup les photos. Mais cette fois je suis beaucoup moins intéressé par le texte. C’est une touche moins personnelle. L’histoire est trop impersonelle. J’ai suivi pendant des années la construction de l’Hermione en allant la visiter deux ou trois fois par an à Rochefort. C’était froid, touristique, sans âme. Je me accroché pendant des années mais le déclic n’est jamais venu. C’est un outil marketing.
Ceci explique peut-être mais je préfère de loin tes vraies histoires avec des vrais gens, de vrais paysages. J’espère que tu reviendras vers des sujets plus personnels comme je les aime tant et qui me font rêver. Je préfère tes introspections intimistes.
Amitiés
J’aime beaucoup tes photos et la « douceur » du développement. Je sais que naviguer à côté de l’Hermione était pour toi, un très beau moment, un moment important.Il est vrai que « Brest 2016 » fût un évènement exceptionnel,je ne m’attendais vraiment pas à ça, pour moi ce fût une belle surprise.J’avoue ne pas avoir accroché à ton texte.